"Contre la précarité, il faut aussi l'éducation populaire"
La précarité s’est répandue par tous les pores de la société. Elle est devenue une norme du système. Même l’amour est précaire déclarait la présidente du MEDEF pour faire croire qu’il s’agit d’un fait naturel. En réalité la précarité ne tombe pas du ciel. Elle découle des exigences de la finance. Le pouvoir des actionnaires repose sur leur capacité à se déplacer au plus vite d’un investissement à l’autre, sans délai et sans coût... renvoyé sur la collectivité. Il faut aller tellement vite que la majorité des transactions financières sont désormais effectuées par des ordinateurs surpuissants qui travaillent à la nanoseconde. En plus la spéculation tire profit de l’instabilité qui en résulte. Aujourd’hui la finance domine et son temps est donc dominant. Tous les compartiments de l’activité humaine doivent suivre ce chaos effréné. Le travail est percuté par la généralisation du juste à temps. Le camion sur les routes remplace le fret jugé insuffisamment souple. L’association de quartier vit de contrats sans cesse remis en cause plutôt que de ressources durables et pérennes. Même dans nos têtes, il faut penser vite, à court terme voire à courte vue. La réflexion cède la place à la pulsion.
Ces évolutions sont proprement inhumaines. Le temps de la finance n’est pas celui qui permet à la personne de se construire. Les femmes et les hommes ont besoin de se projeter dans l’avenir. Les collectifs humains doivent penser le long terme, surtout s’ils veulent enrayer la catastrophe écologique. Le combat du Front de Gauche pour « l’humain d’abord » passe donc par une lutte pour le « temps humain d’abord ».
Emanciper de la peur du lendemain
Tout ceci nous amène à du très concret. Elu député, j’agirai dans plusieurs directions. D’abord je déposerai une loi de titularisation de l’ensemble des précaires de la Fonction Publique. Plus de 850 000 personnes vivent aujourd’hui avec ce statut incertain. Les titulariser ne coûterait rien car elles sont déjà payées par les budgets publics. Et l’argument selon lequel cela menacerait la qualité du recrutement ne vaut pas puisqu’elles sont déjà en poste et l’on peut en déduire qu’elles donnent satisfaction. Ensuite j’agirai pour des quotas maximaux de contrats précaires dans les entreprises privées. Redonner une perspective stable à des millions de personnes diminuera le stress et les tensions dans la société, redonnera de l’oxygène aux travailleurs et de l’appétit pour l’avenir. C’est dans les territoires les plus précarisés de banlieue que j’en attends les effets les plus importants.
Ce combat social a aussi une dimension culturelle. Il faut émanciper les personnes de la peur du lendemain qui les enchaîne aussi sûrement qu’il y a plusieurs siècles un paysan tributaire des aléas climatiques pour survivre. C’est notamment le rôle de l’éducation populaire que de permettre à chacun de se réapproprier le temps long sans lequel on ne peut construire sa vie. Pour cela il faut sortir ce secteur de la précarité qui l’accable. J’adhère à la proposition de la FNMDP de créer un ministère de l’Education populaire, de stabiliser le statut des professionnels du secteur, et de sortir les associations qui en sont le pivot de la dépendance insécurisante vis-à-vis de l’Etat et des pouvoirs locaux.
François Delapierre
Le renouveau de l'Education Populaire...
« Est démocratique, une société qui se reconnaît divisée, c'est-à-dire traversée par des contradictions d'intérêt et qui se fixe comme modalité, d'associer à parts égales, chaque citoyen dans l'expression de ces contradictions, l'analyse de ces contradictions et la mise en délibération de ces contradictions, en vu d'arriver à un arbitrage ». Voici la définition de la démocratie par Paul Ricoeur. Son pendant est une politique d'Éducation Populaire.
La construction du système éducatif actuel prend sa source dans le rapport rédigé par Condorcet en 1791 sur l'organisation générale de l'instruction publique. Si l'Éducation est le moteur de l'avènement du citoyen et de la transformation sociale, elle ne pourra se mettre en œuvre que si l'instruction est associée à l'éducation citoyenne des jeunes adultes disait Condorcet à l'Assemblée constituante. L'enjeu est de former les jeunes et les adultes au développement de l'esprit critique afin d'en faire des citoyens libres et autonomes.
Avec la nomination de Mme FOURNEYRON, Ministre de l'Éducation Populaire, nous vivons un moment historique. Le SEP-UNSA ne peut que s'en féliciter car il exprime une reconnaissance de ce secteur qui représente un million de professionnels.
Le SEP-UNSA a porté tout au long de la campagne présidentielle 23 pistes pour accompagner la transformation sociale et le renouveau démocratique et se félicite d'avoir été entendu par ce gouvernement.
Il reste maintenant à transformer cet affichage en acte car « il n'y a pas d'amour sans preuve d'amour ». Et l'attente est grande pour tous les animateurs et professionnels de l'Education populaire. Qu'ils soient dans le secteur de l'éducation à la nature et à l'environnement, dans l'éducation à l'image et aux médias, dans les maisons de jeunes, dans les centres de loisirs ou encore en colos. Ces acteurs éducatifs ont été les oubliés des politiques publiques éducatives depuis trop longtemps.
Face au déficit démocratique, aux montées des idées d'extrême droite, à la casse du pacte républicain, aux attaques de la laïcité, il est temps de mettre en œuvre une véritable politique d'Éducation Populaire !
Contact presse :
Patrice WEISHEIMER
06-63-14-67-31
sep.sg@unsa-education.org
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