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Jean-Luc Mélenchon répond aux 10 propositions pour faire de l'égalité une réalité
Nous vous remercions de nous avoir sollicités afin que nous puissions vous communiquer nos positions et propositions programmatiques relatives aux questions que porte votre association. Puisqu’il s’agit d’une élection présidentielle, ces réponses s’inscrivent dans un cadre d’analyse plus général qu’il nous faut d’abord exposer.
Nous sommes résolument défavorables aux logiques d'austérité qui au fond ne font qu’aggraver la situation terrible de crise sociale, économique, écologique à laquelle nous faisons face.
Reprendre la main face aux banques et aux marchés financiers, rompre avec les logiques libérales, sont des conditions nécessaires à toute politique efficace contre les inégalités sociales. Nous insistons sur ce point non pour nier la réalité des discriminations dans notre pays et les difficultés spécifiques rencontrées dans les quartiers populaires, mais pour mettre en perspective ce qui les frappe de plein fouet. C'est le tout libéral qui amène à la disparition des services publics, des équipements publics, des financements des politiques publiques y compris locales. C’est le tout libéral qui explique le chômage de masse. C'est la mise en concurrence des territoires et des salariés qui confrontent les quartiers populaires à la précarité et à la pauvreté. Ainsi c'est bien la question sociale et politique qui est en jeu avant tout.
Allons un peu plus loin. Lutter réellement contre la ghettoïsation voire le repli communautaire suppose d’affronter l’égoïsme social de villes comme Neuilly dont le revenu moyen par habitant est de 5116 Euro par mois tandis qu'en Seine St Denis il est de 2060 Euro par mois. Mais vous savez tout cela. Si nous insistons sur ce point c'est parce que nous pensons que le coeur de l'action est la lutte contre les inégalités territoriales.
Comment faire ? D'abord contraindre les plus riches. Ainsi une ville comme Neuilly qui refuse délibérément de respecter la loi en matière de logements publics ne bénéficiera d'aucune subvention de la part de l'Etat. Il nous faut impulser une politique de développement global social et écologique du territoire national appuyé sur un service public de la ville, de l'habitat et du logement.
La première chose à faire pour cela est de casser la spécialisation territoriale : zone dortoir d'un côté, économique de l'autre, concentration des équipements en centre ville, territoires inégalement irrigués par les transports en commun ... Non seulement cela dégrade considérablement les conditions de vie mais exacerbe la concurrence des territoires. Pour cela nous voulons nous dégager des politiques de la ville qui aujourd'hui ont perdu leur sens premier à savoir « donner plus à ceux qui ont moins » au profit d'un saupoudrage de bien peu de moyens, de mesures empilées sans sens ni cohérence, qui accentuent la stigmatisation des habitants des quartiers populaires.
Ainsi nous privilégierons le développement des services publics en matière d'éducation, de santé, de transports, de culture, de sport, etc. afin de garantir leur accès partout et pour toutes et tous. L'enjeu est de mettre en oeuvre concrètement le « droit à la ville ». Services publics sous pilotage national, décentralisés dans leur fonctionnement et bien sûr associant les usagers. Les directives libérales européennes dictées par le Traité de Lisbonne s’y opposent ? Alors, si nous ne parvenons pas à les modifier, nous assumerons d’y désobéir.
Nous relancerons l'activité par des emplois publics et des activités fondées sur leur utilité sociale, le respect de l'environnement et les conditions sociales des salariés.
Immanquablement nous constatons tous que nombre de besoins sociaux ne sont pas aujourd'hui assurés. Immanquablement la planification écologique induisant une mutation de l’appareil de production ne pourra se faire sans salariés et créations d'emplois. Cela s'inscrit dans une logique de re-localisation des activités, condition de la mixité urbaine et moyen d'un développement social et écologique. Mettre l’économie au service de l'intérêt général, c'est comme cela aussi qu'on lutte contre le chômage de masse. Cette politique passe également par une action volontariste pour éradiquer la précarité et augmenter les salaires. Le Front de Gauche défend ainsi la titularisation des 800 000 précaires de la fonction publique et la revalorisation du SMIC à 1700 euros brut en début de mandature et 1700 net d’ici à la fin de la mandature. L’accès de toutes et tous à un emploi stable, rémunéré correctement, voilà l’une des principales urgences qui changera en profondeur la situation subie de chômage de masse des quartiers populaires.
Il est important également pour nous d’évoquer la question fiscale en particulier au vu de votre question n°8. L'enjeu est celui de la redistribution des richesses. Ainsi nous taxerons le travail et le capital au même taux. Nous interdirons les produits spéculatifs dont le seul objet est de faire du profit en dehors de l'économie réelle. Bien sûr les niches fiscales et sociales seront supprimées dans la mesure où elles permettent aux plus riches de l'être un peu plus encore. Nous ne pouvons tout détailler dans cette introduction, mais nous attirons votre attention sur le fait que nous portons des mesures globales de rupture, seuls moyens efficaces de concevoir des scénarios de sortie de crise.
Enfin, nous le constatons toutes et tous. Plus le gouvernement casse les acquis et droits sociaux pour préserver les privilèges des nantis, plus il renforce ses dérives sécuritaires et racistes. Il ne s’agit pas seulement d’une stratégie électoraliste de course aux voix du FN et d’une tentative de détourner l’attention des questions sociales. Plus profondément, il s’agit pour cette droite libérale et réactionnaire d’organiser la mise en concurrence de tous contre tous. De casser les consciences républicaines et les solidarités entre tous les salariés. Il est urgent de rompre avec les politiques sécuritaires et racistes qu’ils ont développées. Il est urgent de mettre un terme aux recherches de boucs émissaires en stigmatisant tantôt les sans papiers, les roms, les citoyens de confessions musulmanes, les jeunes « issus de l’immigration » comme ils disent ou les citoyens français en fonction de leurs origines !
Pour le Front de Gauche, il est temps de refonder la République pour de vrai. Clamer haut et fort que l’immigration n’est pas un problème. Régulariser les personnes sans papiers et fermer les centres de rétention. Abroger les lois sécuritaires. Lutter contre toutes les formes de discriminations. Mettre en place une citoyenneté de résidence. Défendre la laïcité partout et pour toutes et tous. Et bâtir une démocratie véritable. Les institutions actuelles ont éloigné le pouvoir du peuple et l’abstention ne cesse de battre des records et plus particulièrement dans les quartiers populaires. Pour restaurer le pouvoir au peuple, nous convoquerons une Assemblée constituante pour élaborer une 6ème République parlementaire, sociale et participative.
Tels sont les principaux axes de notre programme l’Humain d’abord, qu’il est difficile de résumer en une introduction. Nous vous invitons à en prendre connaissance car nous souhaitons que les élections présidentielle et législatives permettent réellement à l’ensemble des citoyen-ne-s de trancher en conscience entre les orientations et programmes qui leur sont présentés.
La démarche que vous initiez par le biais de votre interpellation sur vos dix propositions y contribue et nous vous en remercions. Votre travail militant, qui vise à susciter l’engagement citoyen et la solidarité des femmes et des hommes des quartiers est à contre courant des injonctions libérales du chacun pour soi et nous tenons à le saluer.
Nous tenons à cet égard à vous faire part aussi, pour exemple, de la dernière initiative qui s’est tenue à Montpellier du Front de Gauche des quartiers populaires qui a rassemblé de nombreux militant-e-s associatifs, citoyennes et citoyens des quartiers populaires.D’autres rencontres se préparent dans de nombreux départements. Les habitant-e-s des quartiers populaires ne veulent plus être considérés comme des citoyens de seconde zone et veulent réunir toutes les conditions pour prendre leur destin en main. Tel est le sens profond de la démarche qu’ils initient ici et là avec le Front de Gauche.
Tels sont l’esprit et la méthode de notre campagne comme de notre projet, celle de l’implication citoyenne. En faire un élément de la Révolution citoyenne nécessaire pour remettre le peuple aux commandes contre le diktat des marchés financiers. Nous aspirons à bouleverser radicalement la vie politique de notre pays pour placer enfin l’humain d’abord.
Proposition n°1 – Immigration :
Régularisons les travailleurs sans papiers.
Parce les travailleurs sans-papiers participent pleinement à l’économie française en payant des impôts, en cotisant, en développant des secteurs comme le BTP et la restauration et en consommant ; parce que les travailleurs sans-papiers participent aussi pleinement à l’économie de leur pays d’origine, en envoyant de l’argent à leur famille et en étant partie prenante de chantiers de co-développement ; pour garantir l’égalité des droits des travailleurs, nous revendiquons : la régularisation des travailleurs sans-papiers.
Le Front de Gauche (FG) défend déjà cette proposition. Il est urgent de régulariser l'ensemble des personnes en situation administre irrégulière, à commencer par les travailleuses et travailleurs sans papiers afin de solder la situation laissée par la droite.
L’ensemble des salariés a intérêt à ces régularisations afin de mettre un terme à cette délocalisation sur place qui vise à tirer vers le bas les salaires et les conditions de travail de tous les salariés. Le FG est de plus favorable à l'établissement d'un titre de séjour unique de 10 ans. Nous exigeons également de rétablir le droit au séjour pour raison médicale et le respect du droit au regroupement familial.
Nous défendons la dépénalisation du séjour irrégulier et la fermeture des centres de rétention afin que cesse la chasse aux migrants. Nous voulons mettre un terme aux accords bilatéraux qui conditionnent les aides aux maîtrises des flux migratoires. Nous nous engageons à lutter contre l’Europe forteresse et à Frontex, la police des frontières.
Le FG établira également un nouveau code de la nationalité, fondé sur le respect intégral et automatique du droit du sol et un droit à la naturalisation facilité.
Le FG s'engage à abroger les lois successives sur l’immigration depuis 2002 et à procéder à une refonte du CESEDA. Le droit d’asile devra être scrupuleusement respecté, déconnecté des politiques migratoires.
Proposition n°2 – Discriminations :
Ouvrons les emplois fermés.
En 1991, l'Europe fait admettre à la France qu'il n'est pas nécessaire d'être Français pour être infirmier, enseignant ou facteur. 19 ans plus tard, près de 6 millions d'emplois ont été ouverts uniquement aux européens. Suite à ce constat, il est nécessaire que l'État français fasse preuve de maturité afin d'ouvrir ces emplois à des travailleurs compétents sans conditions de nationalité. Si l'État légitime une discrimination à l'embauche à l'égard des travailleurs immigrés, pourquoi s'étonner qu'il existe encore des entreprises qui la pratiquent. C'est pourquoi nous revendiquons l'ouverture des emplois fermés.
Le FG est favorable à l'ouverture des emplois des trois fonctions publiques (Etat, hôpital, collectivités territoriales) à l'exception des emplois relevant de fonctions régaliennes, telles que la justice, le budget, la défense, les affaires étrangères. Cela est à déterminer au cas par cas en fonction de la nature des fonctions et des responsabilités conférées, encore une fois, en particulier si elles relèvent d'une fonction régalienne de l'État.
Cette discrimination est d’autant plus scandaleuse quand on sait le nombre d’emplois précaires occupés par des travailleuses et travailleurs étrangers dans les services publics et administrations de l’Etat et des collectivités territoriales. Hautement qualifiés, ils ne peuvent bénéficier des mêmes statuts et salaires que les fonctionnaires français et dorénavant européens. Nous partageons tout à fait le lien que vous faites avec l’incohérence de prétendre lutter contre les discriminations dans l’emploi du secteur privé.
Proposition n°3 – Ville-logement :
Brisons la loi du ghetto.
Bon nombre d’organismes HLM procèdent à un fichage ethnique pour regrouper les locataires en fonction de leur origine. De toute évidence, ce communautarisme forcé exclut, ghettoïse, stigmatise et va à l'encontre du « Vivre Ensemble ». Pour un accès égalitaire au logement social nous revendiquons : l'anonymisation des demandes de logement social.
Le FG est favorable à cette proposition nécessaire pour garantir l'égalité de traitement des dossiers et donc des personnes en dehors de toute discrimination et clientélisme. Mais cela n'est pas suffisant. L’écueil est aussi celui de la rareté. Nous engagerons un plan d'urgence national pluriannuel de construction de 200 000 logements par an pendant 5 ans avec un volet spécifique de logements étudiants et jeunes. Nous ferons du logement un droit et une priorité absolue. Le logement locatif social sera reconnu comme le logement universel accessible à toutes et tous. Nous interdirons les expulsions locatives de toute personne ou famille en difficulté économique et sociale. Nous bloquerons les loyers dans le public et encadrerons leur évolution dans le privé avec l’objectif que la proportion du loyer et des charges dans le budget des familles n’excède pas 20% de leurs revenus. Nous appliquerons la loi de réquisition des logements vacants. Nous créerons un service public national et décentralisé du logement, de l’habitat et de la ville. Nous agirons pour une application résolue de la loi SRU élargie en remontant à 30% en zone de tensions le seuil minimal de logements sociaux. Aucun financement de l’Etat ne devra être accordé aux villes se refusant de faire du logement social.
Proposition n°4 – Justice :
Pauvre ou riche, mêmes droits face à la Justice.
Parce qu’il est moins aisé de faire valoir ses droits lorsqu’on a un faible revenu ; parce qu’en tant que victime ou accusé la France doit garantir à tous un jugement égalitaire ; parce que l’aide juridictionnelle est aujourd’hui de 45€/heure, ce qui ne permet à ses bénéficiaires de pouvoir jouir d’une défense de qualité, nous revendiquons : de doubler l’indemnité horaire perçue par l’avocat à 90€/heure et le relèvement du plafond.
Comment nier qu'il existe de fortes inégalités face à la justice. En cela vous avez entièrement raison d'évoquer les inégalités financières et donc sociales face à celle-ci. Oui la justice sera réformée d'abord pour en garantir l'indépendance aujourd'hui fort mise à mal. Cela fait sens vers la garantie de sûreté qui est un droit pour tout citoyen quel qu'ils soit. Cela suppose bien sûr que le droit à la défense soit lui aussi garanti. Sans nul doute cela passe par une revalorisation de l'aide juridictionnelle mais aussi des moyens alloués aux conseils départementaux d’accès aux droits afin de multiplier les maisons de la justice et les points d’accès aux droits.
Proposition n°5 – Femmes :
Assurons la sécurité et l'émancipation des femmes victimes de violences.
Nombre de femmes sont victimes de violence au sein même de leur propre famille et/ou entourage proche (violences conjugales, mariages forcés, exploitation…). Il est nécessaire de pouvoir faire face à ces urgences et de les accueillir dans des conditions de sécurité, de confort et d’écoute, pour cela nous revendiquons : la création de foyers des hébergements d'urgence dans toutes communes ou agglomérations de plus de 30 000 habitants.
La loi contre les violences faites aux femmes n’a pas bénéficié des moyens nécessaires à son application comme le demandaient les mouvements féministes qui en étaient à l’initiative. Le désengagement de l’Etat dans l’hébergement d’urgence a aggravé la situation. Nous soutenons comme vous la création de foyers et de centres d’hébergement pour femmes sur l’ensemble du territoire. Nous défendons également une loi cadre contre les violences faites aux femmes afin de pouvoir pleinement inclure les propositions élaborées par les mouvements féministes.
Mais faire face à l'urgence, si c'est nécessaire, n'est pas suffisant pour enfin tourner le dos au patriarcat et briser les inégalités entre les hommes et les femmes. Ainsi nous créerons un ministère des Droits des femmes et de l'égalité accompagné d'une loi de lutte contre le sexisme. Les discriminations et insultes à caractère sexiste, ainsi que la banalisation et l’omniprésence de la pornographie et l’instrumentalisation des corps à des fins marchandes doivent être condamnés. Nous donnerons les moyens nécessaires à l’application de ces politiques notamment en matière d’éducation, de prévention et d’informations. La bataille pour l’émancipation des femmes passe également par celle de l’égalité salariale et professionnelle, de l’accès à la santé partout et pour toutes, de la défense des centres d’IVG et des maternités et de la création du service public de la petite enfance.
Proposition n°6 – Économie/Emploi :
Défendons le droit à la formation en lycée pro grâce aux entreprises citoyennes.
Le taux de chômage dans les quartiers avoisine aujourd’hui 40%. Il existe un lien entre le taux de chômage d’un quartier et le niveau de formation de ses habitants. Tout doit être mis en oeuvre par la réussite de ceux qui se sont engagés dans des filières type BEP, CAP et BAC pro. Pour qu'ils puissent trouver des stages qualifiants, nous revendiquons : le déploiement national de la plateforme SOS Stage visant à mettre en contact des lycéens avec des responsables d’entreprises de manière anonyme. Nous réclamons également : une incitation fiscale pour encourager les entreprises à accueillir ces stagiaires et le conditionnement au droit de vote en chambre de métier pour en avoir accueilli.
L’accès à l’éducation et à la qualification est une condition essentielle de tout projet d’émancipation. Le FG augmentera l’investissement de l’Etat dans l’enseignement professionnel de 50 % pour que les enseignements techniques, professionnels et généraux soient d’égale qualité. Car comme vous le signalez, tout doit être fait pour contribuer à la réussite de toutes et tous dans l’accès à un diplôme national qualifiant.
Au sujet de la question des stages que vous signalez, il faut rappeler que c’est avant tout à l’Education nationale de créer les conditions pour permettre à tous les jeunes de pouvoir avoir accès à un stage dans les formations qui le nécessitent. Si les entreprises doivent y contribuer, car elles bénéficient d’une formation professionnelle de qualité de leurs futurs salariés grâce au service public, c’est d’abord et avant tout par leur contribution financière notamment par la taxe d’apprentissage. Au niveau des établissements scolaires comme des rectorats, la mobilisation des personnels et des services doit pouvoir garantir de mettre à disposition des jeunes en formation les offres de stages nécessaires en nombre suffisants. Les moyens en personnels pour y arriver seront débloqués. Nous adhérons au principe que ces offres de stages, émanant des lycées comme des services académiques doivent permettre aux lycéens de pouvoir postuler anonymement afin de lutter contre les discriminations et les inégalités de « réseaux sociaux ».
Nous sommes par contre défavorables aux incitations fiscales que vous réclamez. Le bilan que l'on peut tirer des incitations fiscales est que cela est davantage perçu (et utilisé) comme un effet d'aubaine pour baisser le coût du travail que comme un moyen de créer des emplois et/ou de favoriser l'insertion professionnelle. On connaît le faible impact des 72 milliards d’exonération des cotisations sociales des employeurs sur l’emploi, et leur terrible impact sur le système de protection sociale. Les stages par ailleurs nécessitent d’être plus encadrés. Il est impératif que chaque jeune bénéficie bien d’un tuteur de stage dans sa formation et dans l’entreprise qui l’accueille. Les responsabilités dans le suivi des stagiaires doivent être renforcées. Le cadre légal de la rémunération obligatoire des stages doit également être réévalué. Rappelons également que le recours aux stages par les employeurs ne peut se substituer à des emplois et doivent être des temps de formation.
Ces réflexions doivent également être déclinées pour l’apprentissage. Nous privilégierons les sections d’apprentissage dans les Lycées professionnels publics aux CFA privés. Mais dans les sections d’apprentissages en lycées professionnels comme dans les rectorats, la mise à disposition d’offres de contrats d’apprentissage et les conditions d’anonymat pour y postuler devront être instaurées.
Il est par ailleurs urgent de lutter contre l'extrême précarité des jeunes par une revalorisation et une extension de l'aide sociale immédiatement et par l'adoption à terme d'un revenu sous forme d'allocation d'autonomie appuyé sur un statut social du jeune en formation. En tout état de cause dans ces conditions la relation entre les jeunes quels qu'ils soient et les entreprises changera. Ils seront sécurisés socialement et financièrement et sans aucun doute, plus nombreux à acquérir une qualification sanctionnée par un diplôme.
Proposition n°7 – Éducation Nationale :
Assez d'éducation au rabais.
Pour garantir au plus tôt l’égalité de traitement en France, nous revendiquons : 30% de professeurs en plus dans les ZEP.
Contrairement aux idées reçues, les établissements en zones d éducation prioritaire coûte 30% moins cher à l'État que ceux des beaux quartiers et autres centres villes. Leurs enseignants sont majoritairement débutants, donc moins payés qu'un prof expérimenté. Il ne peut y avoir de République sans une école de qualité pour tous.
Le FG fait de la lutte contre les inégalités sociales et territoriales une de ses priorités. Par conséquent la relance d'une politique en faveur des zones d'éducation prioritaire en constitue un des éléments clés. Cela passe par des moyens humains (plus d’enseignants, qualifiés et formés, des conditions permettant aussi de la pédagogie individualisée, des conseillers principaux d’éducation, des personnels santé et sociaux, des conseillers d'orientation psychologues). Le FG engagera un plan de recrutement dans l’Education nationale sous statut de la fonction publique d’Etat et rétablira notamment tous les postes supprimés, intégrant également un plan de lutte contre la précarité dans l'Education Nationale.
Nous mettrons fin au dispositif dit de « discrimination positive » et d’individualisation de la réussite qui vise à "exfiltrer" très peu d'éléments jugés méritants. le FG fait le pari inverse celui de favoriser l'attractivité de ces établissements par la mise en oeuvre d'options y compris rares et "prestigieuses", par le rétablissement de la carte scolaire accompagné d'organisations urbaines et d'habitat favorisant la mixité sociale.
Proposition n°8 – Éducation Populaire :
Assurons une Éducation Populaire efficace et pérenne.
Pour garantir le financement des associations d’éducation populaire qui agissent dans les quartiers et leur permettre de mener à bien leur projet en toute indépendance, nous réclamons la création d’un fond pour le développement de la vie associative et de l’éducation populaire géré paritairement. Pour alimenter ce fond, nous réclamons 10% des taxes perçues par l'État par le PMU et le LOTO. De plus, nous demandons la création d'un Ministère de l'Éducation Populaire avec 100 000 emplois de fonctionnaires détachés aux associations et collectivités locales des quartiers populaires.
Pour ce qui concerne le partage des richesses, comme nous l’avons indiqué dans notre introduction, nous privilégions plutôt le levier fiscal et sans doute est-il nécessaire de mener une réflexion sur la place des jeux d'argent dans notre société.
Il est essentiel d’accorder les moyens nécessaires aux associations, en particulier celles qui relèvent de l'éducation populaire dans leur mission d'émancipation. Nous connaissons le rôle indispensable qu'elles ont comme support d'initiatives d'habitants et d'animation citoyenne en particulier dans les quartiers populaires.
Le FG s’est déjà engagé en faveur de la création d’un ministère de l’Education populaire et des libertés associatives. Nous définirons à tous les niveaux une politique de soutien financier au monde associatif, transparent et privilégiant les aides au fonctionnement plutôt que les aides à projet qui mettent en concurrence les associations. Il sera nécessaire de revenir sur les suppressions des postes de détachement de l’Education nationale vers l’éducation populaire.
Le FG s'engage à remplacer la circulaire Fillon du 18 janvier 2010 par un texte de nature législative qui conforte les possibilités d'agir des associations au service du bien commun, plutôt que de menacer directement les libertés associatives comme le fait le gouvernement.
Le FG s'engage à exclure les entreprises lucratives des secteurs d'activité répondant à l’intérêt général (besoins sociaux, éducatifs ou culturels) et à consacrer les moyens au développement des associations culturelles, de l’éducation populaire, et de l’économie sociale et solidaire que la concurrence avec « le privé » fait reculer.
Mais comment décider en ce domaine sans les citoyens ? Ainsi le FG souhaite que soit élaborée avec eux une charte de principes définissant les critères de soutien et de financement des associations par secteur d’intervention. Nous établirons à tous les niveaux des commissions d’attribution des subventions afin d’introduire transparence et explicitation des critères retenus dans l’étude des dossiers.
Nous créerons un observatoire national de la vie associative, décliné localement en observatoires régionaux et départementaux, veillant au développement de la formation des responsables et cadres d’associations mais aussi des bénévoles et facilitant les processus de validation des acquis de l’expérience.
Proposition n°9 – Laïcité :
Sauvons la laïcité par le savoir.
Malmené, mal connu, galvaudé, le principe de laïcité est pourtant la base essentielle du principe républicain de notre société. Pour conserver la transmission du fondement de la tolérance, de l'acceptation des différences en cette France plurielle, du respect de toutes les croyances et religions, du refus de l'intégrisme et de la solidarité entre les peuples, nous revendiquons l'enseignement de la laïcité à l'école.
Le FG soutient l'éducation civique à l'école qui inclut l'enseignement de la laïcité, concept politique fondateur d’un cadre de vie commun à toutes et tous, capable de promouvoir l’intérêt général et le bien commun par delà les différences. En ce sens nous rejetons toute volonté de définir l’identité nationale destinée à exclure, au nom de traditions plus ou moins rétrogrades. La laïcité est garante de la liberté de conscience, liberté de croire ou de ne pas croire. Elle exclue donc tout privilège d’une religion ou de l’athéisme. Ainsi fondés, les droits fondamentaux de tout être humain sont universels et permettent à tous issus d’origines et de traditions diverses de vivre ensemble sur des principes sources d’émancipation. L’intérêt général exige un cadre social commun destiné à rendre accessibles à tous les biens fondamentaux. Les services publics, financés par l’argent public, promeuvent la justice sociale et la laïcité est garante de leur accès universel.
Le Front de Gauche milite pour instituer des dispositions renforçant la laïcité dans les services publics au service de l’égalité des droits et du combat féministe. Le féminisme est indissociable du combat laïque, car c’est autour de la question du droit des femmes que se cristallise aujourd’hui nombre des enjeux qui nous opposent aux intégrismes, fondamentalismes, ou courants traditionalistes et autres instrumentalisations politiques du religieux.
Proposition n°10 – Culture :
Des productions audiovisuelles pour Tous et par Tous.
Parce qu’au regard du temps d’antenne en fonction des catégories socioprofessionnelles, les cadres qui représentent 14% de la population ont 66% du temps d’antenne contre 9% pour les 18% d’ouvriers ; parce que les médias ne sont pas représentatifs de la France d’aujourd’hui ; pour que la République Métissée soit mise en valeur, nous revendiquons : que 10% de la redevance TV soit transférée dans un fond à gestion paritaire pour financer des productions audiovisuelles issues des quartiers populaires.
Vous avez raison de vous insurger contre la faible représentation sociale des ouvriers dans les médias audiovisuels. Il en va de même du métissage. Selon les chiffres de l’INSEE, en 2009 on dénombrait 13,1% de naissances issues de couples mixtes contre 5,7 en 1994. La nouvelle France, c’est nous. Nous sommes toutes et tous d’origines et de cultures diverses mais toutes et tous citoyen-ne-s ici. Reconnaissons qu'aujourd'hui nombre d'entre nous sont rendus « invisibles » comme les ouvrier-e-s, les travailleur-eue-s immigré-e-s, les femmes seules, les intérimaires etc. Or déformer la réalité projetée permet d’empêcher de la penser et de vouloir la transformer.
Pour le FG, il faut libérer les médias des logiques financières et du diktat de l’audimat, afin de leur permettre d’accomplir leurs missions au service du pluralisme de l’information et de la culture.
Nous proposons pour ce faire une loi contre les concentrations dans la presse, les médias et l’audiovisuel. Nous créerons un Conseil national des médias composé d’élus, de représentants des professionnels et des usagers, chargé de veiller au respect de la responsabilité publique et nationale, et de favoriser la création de coopératives de presse. Nous refonderons un pôle public des médias et garantirons l’existence de médias associatifs et de la presse d’opinion.
Ces mesures globales nous semblent plus ambitieuses que ne le serait la limitation à 10% de la redevance TV la gestion paritaire d’un fond dédié au financement de productions audiovisuelles issues des quartiers populaires. C’est l’ensemble des médias qu’il faut révolutionner. Et les habitants des quartiers populaires, comme tous les citoyens mais sans doute plus qu’eux car ils sont les invisibles des médias aujourd’hui, doivent la rendre possible, Dans cet esprit, les usagers, y compris des quartiers populaires bien entendus, pourront enfin s’exprimer sur l’ensemble des programmes et productions des médias.
Nous avons essayé de répondre à l’ensemble de vos questions et de réagir à chacune de vos propositions, en exprimant nos désaccords et accords avec franchise, tout en vous faisant partager certaines de nos propositions se rattachant à chacun des thèmes traités. L’ensemble des sujets que vous avez abordés nécessite selon nous un projet global, ambitieux, assumant la rupture avec le système actuel, capitaliste, dont la crise se déroule sous nos yeux.
L’explosion des inégalités, de la précarité et de la pauvreté, les violations répétées de la démocratie et des libertés, le refus des rapports humains fondés sur la solidarité et la coopération, sans parler de la catastrophe écologique que nous n’avons ici pas traitée, impactent en premier lieu les quartiers populaires. Tous ces maux ont une origine commune : la domination sans partage du capital financier. Mais cette domination, nous pouvons en venir à bout. Par la volonté du peuple, nous pouvons inverser les choix politiques qui la maintiennent.
Sortir de la crise ? C’est possible. Pour que les lois qui seront adoptées demain visent à satisfaire l’intérêt général, plutôt que l’avidité insatiable de quelques uns, il faut que soient élu-e-s des dirigeant-e-s qui ne dépendent d’aucune manière de l’oligarchie financière et que le peuple, à la faveur d’une 6ème République, exerce le pouvoir pour de bon.
Il faut une Révolution citoyenne, ici aussi.
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