Opération anti migrant au Col du Portillon : prison avec sursis pour deux cadres de Génération Identitaire

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Mercredi, 21 Septembre, 2022
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Defend Europe est le projet raciste mis en place par Génération Identitaire en 2017. L’objectif est clair, mener des opérations de communication afin de stigmatiser les étrangers et les migrants pour donner l’apparence d’une invasion imminente de la France et inciter à la violence et la haine à leur encontre.

Le 19 janvier 2021, une trentaine de membre de Génération Identitaire, mené par deux cadres de Génération Identitaire, Jérémie Piano et Anne-Thaïs du Tertre, dit Thaïs d’Escufon, se rassemble à la frontière espagnole, au Col du Portillon. Sur le modèle de leur action au Col de l’Echelle dans les Alpes à la frontière italienne, ils déploient une banderole sur un barrage EDF. Dessus est inscrit « Closed border- you will not make Europe home! No way”. Les militants mènent aussi ce qu’ils appellent des « opérations de sécurisation » de la frontière qui consistent à surveiller d’éventuels passages à l’aide de jumelles et de drones. Passages qui en plein mois de janvier en haute montagne ne doivent pas être fréquents…

Génération Identitaire travail depuis sa création en 2012 à créer et propager un sentiment d’hostilité à l’égard de ces populations et légitimer les actions violentes à leur égard puisqu’ils ne seraient que des violeurs, des assassins ou des terroristes en puissance. Nous retrouvons ici la mise en application de l’idéologie raciste du grand remplacement et du fantasme d’extrême droite de l’imminence d’une guerre de civilisation.

Toutefois, l’action de Génération Identitaire en tant que telle ne fera l’objet d’aucune poursuite. Seuls les propos de Jérémie Piano et de Thaïs d’Escufon seront incriminés.  

Il est regrettable que l’ensemble des militants ne soient pas poursuivis alors que leur action aurait pu recevoir deux qualifications :

D’une part, le délit d’immixtion dans une fonction publique. Délit prévu à l’article 433-12 du Code pénal qui dispose :

« Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, par toute personne agissant sans titre, de s'immiscer dans l'exercice d'une fonction publique en accomplissant l'un des actes réservés au titulaire de cette fonction. »

A ce titre, le contrôle du respect des frontières, par la surveillance visuelle ou l’édification d’obstacles, est une opération de police or il est effectué par des personnes hostiles à la circulation des migrants. 

D’autre part, cette opération de surveillance de la frontière peut aussi être constitutive du délit d'exercice d’une activité « dans des conditions de nature à créer dans l'esprit du public une confusion avec l'exercice d'une fonction publique », prévu à l’article 433-13 du Code pénal et puni d’un an de prison et 15 000 euros d’amende. 

En effet, le fait de rechercher et interpeller les migrants à la frontière peut s’apparenter à une mission de police judiciaire dépassant de loin l’autorisation de mettre fin à un délit prévu par l’article 73 du Code de procédure pénale.

Cette solution avait été retenue par le tribunal correctionnel de Gap dans sa décision du 11 juillet 2019 et avait conduit à la condamnation de trois cadres de générations identitaires Clément Gandelin (dit Galant), Damien Lefèvre (dit Rieu) et Romain Espino pour l’opération de Génération Identitaire menée au Col de l’Echelle fin avril 2018. Ils écoperont de six mois de prison ferme, 2 000 € d’amende et la privation des droits civiques, civils et familiaux pendant cinq ans.

Toutefois, ils seront relaxés en appel en octobre 2020, la Cour d’appel estimant que l’opération n’était qu’un acte de « propagande politique ». Cet arrêt de Cour d’appel retire toute la substance de ces infractions pénales et confond droit et politique, il semble désormais difficile de poursuivre les militants de Génération Identitaire sur ce fondement.

Ainsi, le procureur de la République de Saint-Gaudens, Christophe Amunzateguy fait le choix dans notre affaire de ne poursuivre que les déclarations que Jérémy Piano et Thaïs d’Escufon ont tenu et qui ont été posté sur YouTube.

C’est donc la loi sur la liberté de la presse qui est mobilisée et le procureur déclare même à la presse « c'est une procédure très particulière, la question porte sur la liberté d'expression politique »[1].

Jérémy Piano est poursuivi pour les propos suivants postés sur YouTube le 20 janvier 2021 :

« Génération Identitaire est à présent dans les Pyrénées afin de surveiller la frontière franco-espagnole en proie à l’invasion migratoire depuis des années. A travers le col du Portillon où nous nous trouvons actuellement, des milliers de clandestins sont entrés en France. Parmi eux, se trouvent probablement des voleurs, des violeurs et des terroristes en puissance (…) Nous appelons également la jeunesse de France et d’Europe à se révolter contre l’immigration massive et la destruction de notre identité ». 

Ces propos sont constitutifs du délit de provocation à la haine raciale prévu à l’article 24 alinéa 7 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Cet article incrimine auront « provoqué à la discrimination, à la haine, ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personne à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, nation, race ou une religion déterminée ».

L’article 23 quant à lui prévoit les moyens utilisés pour diffuser le discours et notamment l’image accessible au public.

Ainsi, le Tribunal correctionnel retient que les propos de Piano sont publics et visent un groupe bien déterminé à savoir les migrants non européens. De plus, en utilisant les termes « invasions migratoires » « des milliers de clandestins » associé au fait que « parmi eux, se trouvent probablement des voleurs, des violeurs et des terroristes en puissance », le prévenu stigmatise les migrants en voulant montrer qu’ils font peser une menace sur la France et l’Europe. 

Ces propos sont de nature à susciter un sentiment d’hostilité envers ce groupe de personne et incitent le public à les rejeter. Au-delà de l’hostilité, c’est aussi un appel à la violence qui est proféré par Piano. L’exagération de son discours suggère qu’il est impossible de contrôler l’entrée des migrants sur le territoire, il faudrait alors se « révolter » contre les migrants. Il s’agit ici comme le relève les juges nécessairement d’un appel à l’adoption d’un comportement violent.

Il est alors reconnu coupable et sera condamné à deux mois de prison avec sursis et une amende de 3000 euros.

Thaïs d’Escufon quant à elle est jugée pour injure raciale.

L’injure est définie par l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, il s’agit de « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait ».  Le délit est aggravé par l’article 33 alinéa 3 de la même loi, lorsque l’injure est commise envers « un groupe ou groupe de personne à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

 

A cet égard, la prévenue a déclaré dans une vidéo YouTube aujourd’hui  :

 « On peut tout à fait traverser à pied, sans aucun contrôle quand on est un migrant. Il est absolument scandaleux qu’un tel danger sit pris à ce point à la légère par la préfecture alors qu’elle même avait justifié la fermeture du col à cause du risque terroriste et migratoire. Nous, jeunes de France et d’Europe, refusons que notre peuple continue d’être submergé et assassiné par cette immigration massive. (…) Nous nous révoltons contre cette destruction de notre identité. C’est la survie de notre peuple qui est en jeu. A tous ceux qui veulent nous envahir. Retournez chez vous, l’Europe ne sera jamais votre maison. »

Le tribunal correctionnel retient que ce discours est une injure raciale en ce qu’il associe le risque terroriste aux migrants dépeint comme un danger. Thaïs d’Escufon assimile aussi les immigrés non européens à des assassins et des envahisseurs menaçant l’Europe. Elle tient alors un discours outrageant, marqué par une expression de mépris, envers les migrants et porte atteinte à leur dignité et leur honneur.

Elle est alors reconnue coupable d’injure à caractère raciste est condamnée à son tour à deux mois de prison avec sursis et 3000 euros d’amende.

Si leur condamnation est salutaire dans le cadre de la lutte contre le racisme il faut relever que le Tribunal manque de cohérence dans la détermination de la peine :

Alors qu’il retient que les deux membres de génération identitaire sont coupables il relève aussi tôt que « ni Jérémie Piano ni Anne-Thaïs du Tertre n’ont conscience que leurs propos dépassent largement le débat politique en ce qu’ils constituent un appel à la haine raciale (…) ni en ce qu’ils sont méprisants et outrageants (…) envers un groupe de personne, à savoir les non européens ».

Cet obiter dictum donne l’impression que les deux auteurs n’auraient en définitive qu’abusé de leur liberté d’expression et que cette décision est censée les ramener dans le droit chemin ce qui a eu pour conséquence une peine relativement faible. Or leurs propos s’inscrivent dans la propagande raciste et haineuse que Génération Identitaire diffuse au soutien de ses actions de terrain. Piano et d’Escufon sont des militants aguerris de Génération Identitaire et n’en sont pas à leur coup d’essai.

Si leur casier judiciaire est vierge au moment de cette condamnation, Piano est déjà présent en 2012 lors de la première action de Génération Identitaire où 73 militants ont pris d’assaut la mosquée de Poitiers il prend aussi une part active lors de l’opération du Col de l’Echelle tout comme d’Escufon.

Enfin, La communication de Génération Identitaire est millimétrée, rien n’est laissé au hasard. Si les deux auteurs sont publiés sur la page YouTube de Génération Identitaire c’est que leurs discours ont été validés par un organe décisionnel. Il est d’ailleurs regrettable que le Tribunal ne fasse pas mention de la dangerosité de Génération Identitaire ou des liens qu’entretiennent les deux militants avec l’organisation.

L’enjeu du procès était là, condamner des militants d’extrême droite pour avoir mis en application le programme raciste et anti migrant de leur organisation. Cela n’en aurait pas fait un procès politique mais une simple application du droit pénal.

 

 

 

[1] https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/deux-militants-de-generation-identitaire-condamnes-apres-l-operation-anti-migrants-dans-les-pyrenees-1631184664

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