CGT : un nouveau visage ?
Nadjib SELLALI : Pourquoi la CGT n’a jamais eu, à sa tête, un leader syndical issu de l’immigration ?
Nasser Mansouri (Responsable des études économiques de la CGT) : Henry Krasucki, ancien dirigeant CGT, était issu de l’immigration polonaise. Par contre, il n’y a pas eu de correspondance entre la présence des travailleurs immigrés dans le mouvement syndical et les directions des organisations. Il semble que ce défaut se résorbe peu à peu même s’il reste encore des choses à faire en la matière. Pour ma part, ce qui est important dans le mouvement syndical c’est d’être un travailleur militant et non pas être originaire de l’immigration.
Amar Lagha (Chargé du commerce à la CGT du Rhône) : J’espère que l’on ne mettra pas une personne à la tête d’une organisation syndicale parce qu’il s’appelle Amar ou Mamadou ! Nous élisons nos dirigeants au regard de leurs compétences et l’on ne peut pas dire de nos directions confédérales qu’elles ne soient pas représentatives de la population française.
Mohamed Oussedik (Membre de la commission exécutive de la CGT) : C’est dû à un facteur historique, le bastion essentiel était dans le secteur public donc soumis aux conditions de nationalité. Ensuite il y a eu une continuité de cet état de fait dans nos organisations. Mais ce qui commence à bouger c’est qu’il y a de plus en plus de jeunes, issus de l’immigration, qui s’engage dans le syndicalisme, ce qui permet d’appuyer la reconnaissance syndicale à leur égard, chose qui n’était pas une évidence il y a encore peu de temps.
Nadjib SELLALI : Comment la CGT compte t-elle rassembler les salariés du BTP, de l’hôtellerie/restauration, de la sécurité, autour de luttes syndicales alors qu’ils n’ont aujourd’hui aucun droits ?
Nasser Mansouri : C’est un problème global que rencontrent toutes les organisations syndicales. La CGT travaille dur pour la défense de ces travailleurs. Le problème c’est que dans ces secteurs, les travailleurs sont de plus en plus isolés ce qui constitue un réel enjeu pour le mouvement syndical. Il s’agit là d’un réel défi pour l’ensemble des mouvements syndicaux pour représenter ces travailleurs.
Nous proposons par exemple la constitution de « syndicat de site » sur ces petites structures ce qui offrirait des droits à tous les salariés qui travailleront dans ces entreprises.
Amar Lagha : Pour les petites entreprises, type PME de 8 à 10 salariés, la CGT s’engage dans un combat qui s’appelle « La représentativité » car malheureusement dans ces boîtes, il n’y a pas de droit syndical malgré le fait qu’il y ait des sympathisants salariés. Nous avons de réelles difficultés à nous introduire dans ces types d’entreprises où les salariés n’ont pas le droit à la représentativité syndicale. Pour y aboutir, nous avons engagé des négociations nationales, accompagnées de rencontres avec les salariés. Nous mettons aussi à disposition des permanences juridiques puisque ces salariés pensent qu’ils n’ont aucun droit. Nous allons d’ailleurs organiser « des campagnes de syndicalisation » prévues à cet effet.
Mohamed Oussedik : Je ne crois pas qu’il y ait de décrochage…Aujourd’hui le secteur tertiaire est majoritaire ce qui a amené un éclatement salarial qui se traduit par une multitude de TPE, PME,… Il s’agit donc pour la CGT de s’adapter à cette nouvelle réalité et non pas l’inverse. Notre combat pour les travailleurs sans-papiers fait partie de cette nouvelle réalité. Je ne pense pas qu’à l’heure actuelle on puisse parler de divorce entre les salariés des petites entreprises et les grandes organisations syndicales, bien au contraire...
Propos recueillis par Nadjib SELLALI-Nantes.
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